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26/07/2024
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En plein cœur des Landes de Gascogne, une bataille silencieuse se joue pour la survie de l’abeille noire locale. Cet écotype, devenu rare dans les Landes, est en danger en raison de multiples facteurs tels que la pollution, les changements climatiques, l’utilisation abusive de pesticides ou sa présence déclinante dans les ruchers. Le Conservatoire des races d’Aquitaine en collaboration avec le Département et de nombreux partenaires locaux dont l’Office National des Forêts (ONF) et les apiculteurs, mène une mission déterminante pour sauver ce patrimoine vivant landais. « Le programme vise à dédoubler, en lien avec des apiculteurs volontaires, les colonies identifiées comme génétiquement intéressantes et à les placer dans des zones de protection pour observer leur évolution », explique Régis Ribéreau-Gayon, fondateur et président du Conservatoire des races d’Aquitaine.
Le premier espace « sanctuaire » a été établi à Biscarrosse au Centre d’Essais des Landes (CEL) avec quatre ruchers et une trentaine de colonies. « C’est une zone militaire qui est difficile d’accès et sans présence d’apiculteurs autour. Elle est donc idéale pour créer une zone de conservation », précise Maeva Dramet, chargée de mission « Abeille noire ». Des ruchers ont aussi été implantés dans la forêt communale de Biscarrosse. D’autres initiatives impliquent des apiculteurs et des communes locales en vue de densifier la présence de cette abeille sans compromettre les activités apicoles existantes. « L’objectif est de créer plusieurs colonies et d’essayer de diversifier leur génétique pour assurer leur viabilité future », indique la chargée de mission.
L’intérêt de conserver l’abeille noire des Landes de Gascogne repose sur deux arguments majeurs. D’une part, au-delà de leur valeur historique, la diversité génétique est un trésor inestimable. « Toutes les races que nous conservons peuvent sembler inutiles aujourd’hui, mais leur valeur pourrait se révéler demain. On conserve une ressource génétique même si nous ne savons pas encore quel sera son rôle. C’est exactement ce qui s’est passé avec la préservation du mouton landais », souligne le président du Conservatoire.
D’autre part, cette abeille est rustique et pourrait s’avérer plus résistante aux évolutions climatiques, notamment à la chaleur grâce à sa capacité d’adaptation. Le Conservatoire aime rappeler que « l’abeille est la ressource historique du département des Landes avec le mouton et la résine ». Depuis l’Antiquité, la région est réputée pour sa production de miel. Son paysage de bruyères, aux fleurs tardives, a façonné un mode de butinage, contribuant à créer les particularités de l’abeille noire des Landes. « Elle est plus noire, plus trapue et a des différences génétiques. Elle adapte son cycle de vie aux floraisons locales tardives de la bruyère ou de l’arbousier et ainsi s’adapte aux changements de temps », complète Maeva.
Dès les années 60, les chercheurs ont identifié cette abeille comme spécifique à la région. Trente ans plus tard, dans les années 2000 des études génétiques ont confirmé ces observations, recommandant la protection de l’espèce. « Cet écotype aurait mérité d’être conservé plus tôt car c’est la première variété d’abeille locale identifiée en France », regrette Régis Ribéreau-Gayon.
En 2018, la Région confie une mission au Conservatoire, permettant ainsi de commencer les inventaires génétiques l’année suivante pour rechercher ces précieuses colonies. « On a prospecté plusieurs années pour aller à la pêche et identifier des profils. On voulait trouver la variété locale avec son éco-adaptation au milieu », développe Régis Ribéreau-Gayon. Le Conservatoire a ainsi regroupé des colonies de type « noire » pour partie locale grâce à son réseau d’apiculteurs, d’associations et d’institutions. « Chaque étape franchie est cruciale », estime le conservateur. « On essaie de sensibiliser le public, les scolaires et on va aussi à la rencontre des apiculteurs, même si beaucoup aujourd’hui sont très investis et travaillent avec nous », détaille Maeva Dramet.
Malgré les avancées, le chemin reste encore long avant de pouvoir pérenniser les colonies et les diffuser aux apiculteurs. Dans cette course contre la montre, chaque abeille sauvée est un pas de plus vers la sauvegarde d’un patrimoine écologique fragile car, conclut Régis Ribéreau-Gayon « tout ce qu’on gardera pour demain c’est ce qu’on va trouver aujourd’hui ».
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