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28/06/2022
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Dans la matinée, lors de la première « Rencontre avec... » de la semaine flamenca montoise sous le chapiteau de la Place Saint-Roch, Patricia Guerrero avait prévenu : « ce spectacle, c’est comme un plat cuit à feu lent, qui garde toutes ses saveurs et toute sa richesse, malgré les difficultés qu’on a pu rencontrer (pendant ces deux années Covid) qui ont forcément marqué le processus de création ». Lundi soir, ce fut littéralement une explosion de saveurs, piquantes, douces, mordantes, pétillantes. Le Café Cantante, qui n'avait plus entendu ni tacones ni guitare durant ces trois années blanches, s'est réveillé pour contempler l'étoile de Grenade, nourrie d'influences du ballet classique espagnol et de danse contemporaine.
Son arrivée sur scène en robe longue drapée crème, dans le noir, sans musique, pour quelques minutes en solo au son de ses pieds martyrisant le sol, ses longs bras dessinant d’envoutantes arabesques, a planté le décor d'une soirée d'exception. Patricia Guerrero, prix national de danse 2021, et ses danseurs solistes, ont porté le public dans leur rêve de création « où se fait et refait sans cesse la même chose, comme Alice au pays des merveilles courant dans un monde parallèle ». Dans ce ballet flamenco unique à l'énergie débordante, danse un homme en robe noire, résonnent des castagnettes modernes, virevolte un éventail, bouge le corps animal.
Un flamenco qui s'appuie sur la tradition mais avec des arrangements scéniques contemporains. Le piano dissonant jazzy entêtant, la guitare flamenca d'où sortent quelques notes d'Albéniz, les percussions ultra-rythmiques, et le chant à deux voix, ouvrent une nouvelle voie par la musique originale composée par Dani de Morón pour ce défi chorégraphique.
« Du flamenco à la Dalí », « formidable », entendait-on dans les travées où les sourires illuminaient les visages à la fin de la représentation. Une spectatrice conquise a savouré « les différents langages corporels : on sentait la danse classique, aussi un peu la comédie musicale avec le passage des cannes des danseurs, et un côté hip hop avec tous ces mouvements hachés ». « Intense, saccadé, sensuel », résume une autre. Partout, des mots qui font écho à ceux de Juan Dolores Caballero « el Chino », metteur en scène et dramaturge de Deliranza qui, en préparant ce spectacle, a eu « la sensation de monter dans une fusée et de décoller ».
Pour cette création, la danseuse chorégraphe et son équipe ont notamment travaillé avec un spécialiste de la danse butō japonaise, Coco Villareal, pour un travail de l'intimité sur l'immortalité. « L’art se nourrit d’art. Ce fut une expérience très enrichissante pour notre groupe, ça nous a permis d’avancer dans une direction nouvelle », assurait le matin même Patricia Guerrero : « Deliranza a un son et un mouvement particuliers. Je ne voulais m’imposer aucune limite, que rien ne soit établi à l’avance. Je suis allée au-delà des codes et les choses se sont faites au fur et à mesure de la création ».
Le spectacle a nécessité plus de deux ans de travail, avec des résidences artistiques en Espagne et à Mont-de-Marsan.
Cette première mondiale (une nouveauté à Mont-de-Marsan en 33 ans d'Arte Flamenco) illustre, de la plus belle des manières, la volonté renouvelée du festival d'encourager la création. « Nous jouons notre rôle en ne nous contentant pas de faire venir des spectacles mais en accompagnant des artistes et talents émergents, avec comme double objectif : le soutien à la création et le développement territorial », souligne Lionel Niedzwiecki, son directeur général.
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