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01/07/2021
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En ouverture de cette rencontre littéraire et gourmande organisée par la Médiathèque des Landes, Benoît Peeters a confié avoir eu deux mentors à l'époque de ses études : « mon professeur, Roland Barthes, et un maître plus secret, Michel Guérard, dont j'ai pratiqué d'abord la Cuisine minceur puis la Cuisine gourmande, un livre d'intelligence de la cuisine pour moi qui n'avais pas eu de transmission en la matière pendant l'enfance ».
Michel Guérard a, lui, connu Peeters à travers les Cités obscures, son envoûtante série dessinée par François Schuiten : « j'étais un fan de bandes dessinées, avant notre rencontre, je le connaissais donc déjà ! ». De son enfance en Normandie, « mélange incessant d'angoisse et de joie », le grand cuisinier a d'ailleurs gardé le goût du dessin : « j'ai eu la chance d'être sauvé de la diphtérie, mais j'ai dû rester longtemps au lit, je m'amusais à dessiner... ». C'était en 1943, en pleine guerre : « on avait faim, on avait peur, on a failli mourir plusieurs fois comme ce jour où trois SS nous ont menacé à la mitraillette pour tenter de nous faire avouer où on avait caché une vache ».
« Depuis je suis heureux même quand je reçois la note du percepteur ! », sourit cet éternel optimiste qui, petit, voulait devenir curé, puis comédien et médecin. « Finalement, a lancé Peeters, ces métiers abandonnés, vous les avez pratiqués ! Médecin par la cuisine santé, comédien car la haute cuisine est un art du spectacle, et curé pas tout à fait mais quand même dans votre façon de vous comporter dans le respect des autres ».
Au sortir de l'école, les parents Guérard - son père était boucher - lui ont vite fait comprendre qu'il fallait qu'il trouve un métier. « Il n'y en avait alors qu'un possible : tout ce qui était bon à manger. Ma grand-mère était merveilleusement pâtissière et cuisinière, maman aussi. J'ai commencé grâce à la gourmandise. Et quand je vois aujourd'hui certains apprentis pas gourmands, je me dis qu'il vaudrait mieux qu'ils deviennent avocats ! », pointe cet infatigable défenseur des métiers manuels, devenu meilleur ouvrier de France pâtissier à tout juste 25 ans.
Suivra comme il dit, « une formidable vie de bohème », de ses années Lido à la table du dernier G7 à Biarritz où Angela Merkel lui parla longuement de son bonheur à cultiver les fines herbes... Dans son premier restaurant d'Asnières, le Pot-au-Feu, acheté à la bougie sans même l'avoir vu, ses premiers clients étaient des malfrats du quartier puis, avec les étoiles, s'y pressaient le Duc de Windsor, Marlène Dietrich ou John Frankenheimer venu ici prendre des cours de cuisine.
Eugenie-les-Bains ? « Ca s'est fait drôlement ! ». Bientôt exproprié du Pot-au-feu, il reçoit un coup de fil de Christine Barthélémy (héritière de la Chaîne thermale du soleil) pour le remercier d'avoir accueilli un jeune chef. « Je lui ai donné rendez-vous au Régineskaïa, j'ai donc rencontré ma femme parmi les violons et les balalaïkas ! ». En arrivant dans les Landes, « je me suis dit, nom de Dieu, où est-ce que j'ai mis les pieds ? Et puis j'ai reçu un accueil formidable ici, je me suis trouvé à l'aise et heureux très rapidement ». Il y obtient ses 3 étoiles en 1977, elles ne le quitteront plus.
Dans cette trajectoire de vie unique, ses rencontres et ses expériences tracent toute une période de la cuisine française, au côté de ses copains Bocuse, Troisgros et Senderens, avec qui il invente la Nouvelle Cuisine et voyage en Chine à la découverte du rôtissage du canard...
Dans l'assistance, Charles Roux n'a pas raté une miette de ces échanges culinaro-littéraires sur scène. Le photographe en a d'ailleurs profité pour faire passer à M. Guérard le livret de son exposition actuelle au Musée de Samadet, dont il a fait une visite guidée à M. Peeters.
Dans ses Festins littéraires (Fictitious Feasts), l'artiste qui cuisine lui-même pour les besoins de ses photos, reconstitue et imagine des scènes de repas, comme des tableaux de natures mortes, à partir de fictions qu'il a aimées, des Misérables de Hugo au Journal de Bridget Jones. Sa dernière création qui sera dévoilée dans quelques jours à Samadet, contiendra des faïences vertes typiques du coin puisque, ce printemps, ce natif d'Orléans, aujourd'hui à Paris, s'est penché sur La Cheffe, roman d'une cuisinière, de Marie Ndiaye, où l'héroïne révèle son talent dans une cuisine landaise.
Prochain « Rendez-vous avec... » : Sarah Biasini, la fille de Romy Schneider, à Labouheyre, le 2 septembre.
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