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A la lecture sur le tableau numérique du texte Autobiographie du poète turc exilé Nâzim Hikmet, la professeure de lettres Sandrine Ferrer demande à ses élèves si des mots leur sont inconnus. Catafalque, pacha... la version papier devant les yeux, Hugo ouvre une nouvelle fenêtre sur l'ordinateur devant lui, et le Petit Robert apparaît pour une définition en deux secondes chrono. « On a plusieurs dictionnaires installés, c'est plus rapide que sur papier », dit le jeune d'Hagetmau, en 3e au collège Jean-Marie Lonné.
Ce jour-là, les élèves travaillent aussi à d'autres sujets sur l'autobiographie à la manière de Georges Pérec et Roland Barthes. « J'aime le basket, la raclette (…) le bruit des vagues qui s'éclatent (…) Je n'aime pas le racisme, les personnes toutes seules, les cris de douleur », invente Jean sur son clavier : « ça me plaît plus d'écrire sur l'ordinateur, on peut tout changer sans raturer ». Derrière lui, tandis que Margaux dit avoir toujours « besoin de griffonner » au crayon sur une feuille, sa copine Thalia trouve que « ça va plus vite, c'est plus simple » avec l'ordinateur : « en musique c'est bien aussi, on peut créer des pistes audio de différents sons pour créer des ambiances » et « à la maison ça sert pour les devoirs et pour regarder internet ». Dans cette classe, si beaucoup de choses se passent en numérique, les devoirs, les dictées et évaluations continuent de s'écrire à la main.
Pour l'enseignante, « les outils informatiques aident à faire grandir les jeunes citoyens dans le monde qui les environne, en facilitant l’acquisition des moyens de penser, et de s’exprimer, à l’écrit comme à l’oral, en permettant de tendre vers les expertises suivantes : savoir rechercher tous types d’éléments d’information, savoir les recevoir dans un esprit critique, savoir écrire, écouter et parler, partager ». Sandrine Ferrer fait notamment travailler l'oral à ses 3e en vue des épreuves de fin d'année du brevet des collèges : ils enregistrent leur voix et leurs travaux sur le logiciel Audacity, lui envoient par mail, et elle les corrige, en retour, en audio.
Dans chaque disque dur de chaque ordinateur prêté, sont logés par les services du Département, une centaine de logiciels et ressources dans toutes les matières : dictionnaires français ou de langues étrangères, encyclopédies, bureautique, trigonométrie, calculs animés, conjugaison, montages vidéos, livres et romans libres de droits, documentaires locaux avec les archives départementales, logiciels de musique, de création graphique ou d'astronomie...
« L'opération prêt d'ordinateur n'est d'ailleurs que la face immergée de l'iceberg », assure Pierre-Louis Ghavam, chef du service du numérique éducatif au Département, car en parallèle, au fil des années, toutes les tables des salles de classe ont été câblées électriquement et en réseau, avec installation de vidéoprojecteurs et de tableaux interactifs. Un éco-système qui se fait en partenariat avec l'Education nationale, via notamment des conventions avec le rectorat de Bordeaux qui cadrent les formations et précisent les objectifs à atteindre.
Dans les collèges, chaque professeur utilise ces outils à sa manière et à son rythme avec ses élèves (simple projection de documents, transmission des devoirs, création d'exposés, exercices sur des sites internet, vidéoclip...) et ce, indifféremment des matières, même si certaines disciplines sont plus utilisatrices que d'autres : mathématiques, sciences de la vie et de la terre, physique-chimie, musique ou arts plastiques. Les langues vivantes aussi, comme avec Nadine Castéra au collège Aimé Césaire de Saint-Geours-de-Maremne.
Tifenn, Anaelle, Sofia et Oriane n'imaginent même plus leur cours d'espagnol sans ordinateur : « on peut réécouter plusieurs fois les mots et les textes selon nos besoins pour mieux comprendre », « on trouve facilement du vocabulaire sur wordreference », « on peut se faire l'oreille sur les bonnes prononciations, les différents accents », « on prend des notes plus facilement pour faire des synthèses ensemble et on utilise moins de papier »... « des copains et des cousins qui vivent dans d'autres départements nous disent qu'on a de la chance d'avoir des ordinateurs ici ! »
« Les élèves créent par exemple des cartes mentales sur l'ordinateur pour faire apparaître des thématiques avec des mots de vocabulaire qu'on projette sur l'écran. On fait des dialogues filmés, des jeux de rôle au restaurant ou au guichet du cinéma et on retravaille ensuite les erreurs en revenant sur les points grammaticaux ou l'objectif de la leçon », éclaire Mme Castéra qui garde toujours une trace écrite sur le cahier des élèves car l'ordinateur est un outil, « pas une fin en soi ».
Arrivée en 2001 de l'académie de Créteil dans les Landes, l'année où Henri Emmanuelli initia l'opération « un collégien, un ordinateur portable » dans trois établissements du Département, l'enseignante d'espagnol a « tout de suite vu des nouvelles perspectives d'enseignement » grâce à l'outil numérique. « Au lieu d'avoir un document en collectif où souvent on perd des élèves, là ça permet de mieux personnaliser, et surtout que l'élève trouve son rythme dans la découverte », avec constamment la consigne à l'esprit « de ne pas passer trop de temps sur la manipulation de l'outil au détriment du contenu ».
Preuve de l'intérêt suscité par le numérique, en 2019, 57 % des enseignants des collèges landais (contre 40 % en 2009) disent avoir demandé à leurs élèves de 3e et 4e de se servir de leur équipement informatique à tous les cours, très souvent ou au moins à la moitié des cours, selon une enquête ASDO Etudes.
Egalement professeure de français au collège de Linxe, Mme Lagorce a aussi proposé des cours en vidéo au printemps confiné mais certains élèves peinaient par une mauvaise connexion : « cela montre aussi toute l'utilité de la fibre optique qui couvrira 100% des Landes d'ici fin 2022, ça révèle l'importance de cet autre investissement majeur du Département ».
S'il y a eu quelques décrochages, l'ordinateur a, pour la plupart des collégiens de 3e, 4e et 5e, été utile tous les jours pendant le confinement pour assurer la continuité pédagogique : les professeurs ont d'ailleurs pu organiser des classes virtuelles.
Au collège Langevin Wallon de Tarnos, le principal Stéphane Fringant estime aussi que « la mise en place de la continuité pédagogique au début du confinement, a été fortement facilitée par le fait que les élèves et les professeurs avaient un matériel homogène qu'ils manipulaient déjà chaque jour. Ils ont pu s'emparer très vite des classes virtuelles ».
Pour lui, ce n'est d'ailleurs « pas simplement grâce au matériel que les choses se sont bien passées, mais aussi grâce à l'humain ». Ainsi dans chaque collège, un assistant informatique rétribué en partie par le Département, est là pour régler tous les soucis du quotidien. « Il a eu un rôle très important à distance, pour des bugs, des problèmes de connexion, etc. Il a passé plusieurs heures au téléphone tous les jours à dépanner des élèves », souligne M. Fringant.
Actuellement avec le deuxième confinement, deux professeurs vulnérables qui restent à la maison, continuent d'organiser des classes virtuelles avec leurs élèves dans une salle du collège de Tarnos, avec un assistant d'éducation pour surveiller. Car il n'est évidemment pas question pour les élèves de surfer sur internet pendant un cours, sauf si c'est pour aller faire des recherches à la demande de l'enseignant.
Les établissements ont d'ailleurs des moyens de supervision pour s’assurer qu'il n'y a pas de dérives sur des sites interdits durant la présence au collège. Plus globalement, « l'éducation aux médias et à l'information, au sens large, est une dimension à laquelle le Département est très attaché », souligne Renaud Vauthier, directeur de l'Education, de la Jeunesse et des Sports, au Conseil départemental. En témoigne notamment l'opération « Collégiens citoyens » menée avec l'association des Francas des Landes, entre webradio, webtv et informations par l'échange et l'action collective, ce qui permet des utilisations pertinentes des outils numériques, tout en favorisant les prises d’initiatives citoyennes de la part des collégiens.
En chiffres
85 000 collégiens concernés par l'opération depuis 2001
10 521 ordinateurs portatifs dont 1 267 dédiés aux professeurs déployés actuellement par le Département dans les 39 collèges publics landais, pour tous les 4e et 3e, un tiers des 5e et quelques classes de 6e.
1 064 tablettes numériques choisies par trois collèges : Roquefort, Grenade et Soustons.
Un coût global de 3,6 millions d'euros par an.
Les ordinateurs sont renouvelés tous les trois ans. Depuis 2011, une partie d'entre eux (2 500 cette année) est notamment réemployée par l'ALPI (Agence landaise pour l'informatique) pour poursuivre une seconde vie dans des écoles maternelles et primaires landaises.
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