Le BAT40, un soutien précieux des productions audiovisuelles dans les Landes

En ce matin d’octobre, la brume automnale nimbe le château de Lacaze d’une aura de mystère. Isolée au milieu des vignes et des bois, à 3 kilomètres du village de Parleboscq, la bâtisse du XIV^e siècle en impose, avec ses 5 étages et ses 3 hautes tours percées de petites fenêtres. Le lieu diffuse une atmosphère d’intemporalité et d’abandon. On ne serait pas surpris outre mesure d’y trouver la Belle au bois dormant.

En contournant le bâtiment, on bascule brutalement dans une autre époque, nettement plus contemporaine. Le jardin est envahi par un bric-à-brac d’objets colorés. La façade sud arbore un gigantesque graffiti doré figurant une couronne. Sous les cris et les huées, des gendarmes et des policiers du RAID délogent sans ménagement une cinquantaine de jeunes squatteurs. Au milieu de la cohue, cameramen et preneurs de son captent en gros plan les regards de défi et les échanges verbaux. Et trahissent la nature factice de l’affrontement, car c’est bel et bien une équipe de tournage qui s’est installée pour 3 jours aux confins des Landes et du Gers.

Drone games est une fiction unitaire produite par la société White Lion Films pour le compte d’Amazon Prime Video. Pour raconter le parcours chaotique d’une bande anarchiste qui se lance dans le braquage de banques à l’aide de drones, le réalisateur Olivier Abbou – auteur des Papillons noirs, diffusé récemment sur Arte – recherchait « un terrain de jeu avec de grands volumes qui se prêtent à des scènes de fêtes, psychédéliques. Le côté médiéval de l’architecture amène un décalage avec la modernité de l’histoire ». 

Pour créer de toutes pièces ce squat rural, David Bersanetti, directeur artistique et fidèle complice d’Olivier Abbou, s’en est donné à cœur joie dans les coins, les recoins, les étages et les vastes salles vides du château de Lacaze. La grande table du salon est convertie en terrain de golf ; des tags - effaçables ! – décorent les murs ; un système de projection tapisse le sol d’une galaxie d’étoiles ; et, pour illustrer les délires sous psychotropes de ces jeunes sans entrave, la salle de bain est transformée en mini-jungle : « on a joué sur l’idée de lieu de vie éphémère, en imaginant comment ces gens qui ont des idées politiques et des envies d’art s’approprient l’espace. Cet endroit, qui ressemble à un château de princesse, est un vrai bel outil. Le mélange des deux univers est très intéressant et apporte des choses très cinématographiques ».

C’est grâce à l’accompagnement du Bureau d’accueil de tournages des Landes (BAT40), créé par le Conseil départemental en 2018, que la production a pu dénicher ce décor atypique. Sa coordinatrice, Marine Jorda, en avait trouvé une photo sur internet, en a parlé au maire de Parleboscq qui l’a orientée vers la famille Grassa, propriétaire du domaine Tariquet à Eauze, qui a acquis Lacaze il y a quelques années pour en exploiter les vignes. Elle se réjouit « d’attirer des productions vers l’intérieur des Landes et de montrer d’autres aspects du territoire. En plus, ce film va certainement drainer un public plus jeune qui va ainsi découvrir notre département ». 

Ludovic Eyrolle, directeur de production de Drone Games, s’est également appuyé sur le BAT40 pour trouver des fournisseurs pour le matériel électrique ou la location de voitures. Sans compter l’hébergement : « comme on tourne jusqu’à 6 ou 7 heures du matin, je veux loger les figurants dans les environs. Avec l’équipe du film, cela peut représenter une centaine de personnes en tout ».

16 techniciens landais ont été embauchés pour le tournage. Pour Agnès Deal, maquilleuse installée à Saint-Julien-en-Born, ce n’est pas une première puisqu’elle avait œuvré sur la série Chair tendre, tournée dans les Landes et élue meilleure série française au festival Series Mania de Lille en 2022 : « je suis inscrite dans les fichiers du BAT, qui nous envoie des plannings de prévisions de tournages et transmet nos CV aux productions ». Pour la recherche de figurants, « des étudiants en communication nous aident depuis 2 ans développer nos réseaux sociaux », explique Marine Jorda. C’est via une annonce Facebook que Dorian Millet, jeune agriculteur de Losse, s’est invité sur le plateau « pour découvrir le monde du cinéma » : « j’étais un peu intimidé au début, je ne savais pas trop comment me positionner, mais c’est une expérience sympa ».

Avec ce film, Olivier Abbou continue à tisser une relation ancienne avec les Landes : « j’ai tourné un court métrage à Contis en 1999 et j’y suis revenu à plusieurs reprises, pour le festival ou en vacances. Quand je me suis lancé dans le scénario avec Thibault Lang-Willar, je lui ai suggéré les Landes pour les paysages. On a d’ailleurs écrit en partie à Contis ».

De fait, Drone Games a sillonné le département au long de 28 jours de tournage, étalés entre septembre et novembre 2022 : à Parleboscq, donc, mais aussi à Lit-et-Mixe, Contis, Morcenx-la-Nouvelle, Azur, Soustons et Mont-de-Marsan. Outre l’accompagnement par le BAT40, le téléfilm a bénéficié d’un soutien financier du Département d’un montant de 50 000 €.