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07/01/2022
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« On est parti de rien » : Christian Cave était de la toute petite poignée d’industriels landais qui, en 2000, a fait le pari de relancer l’exploitation locale du chêne-liège. Au XIXe siècle, le liège landais était employé pour fabriquer des ruches, des filets de pêche ou pour du bouchage. La gestion de cette ressource est tombée en désuétude depuis les années 50, victime de la sylviculture intensive du pin maritime et de l’importation venue de pays à faible coût de main d’œuvre. « Il a fallu partir à la pêche des propriétaires, des communes et communautés de communes, de l’ONF (Office national des forêts). On s’est appuyé au départ sur de la main d’œuvre du Var, parce que le savoir-faire avait disparu localement », se remémore l’ancien directeur d’Agglolux-CBL à Soustons, à l’origine de cette démarche avec les sociétés Au liégeur et Aliecor.
Cette essence existe pourtant depuis fort longtemps dans la zone côtière, de Tarnos à Lit-et-Mixe, en raison d’un climat favorable : faible amplitude thermique, pluviométrie conséquente et régulière sur une année, sol adapté. On trouve des suberaies (forêts de chênes-lièges) en sous-étage dans les plantations de pins maritimes, en bordure de piste ou de parcelle et sur le relief des « tucs », les dunes anciennes caractéristiques du Marensin.
Avec trois autres industriels landais, Christian Cave crée en 2005 « Le liège gascon » dont l’objectif affiché est « la mise en valeur de cette ressource locale, de ses utilisations et du savoir-faire qui s’y rattache, dans un souci de développement durable et dans un esprit de regroupement et de concertation de l’ensemble des acteurs de la filière ». Avec le soutien financier de la Région, du Département et de 3 collectivités locales (MACS, Côte Landes Nature et Pays Adour Landes Océanes), l’association se structure, intègre des entreprises du Lot-et-Garonne et de Gironde, et déploie différentes actions avec ses partenaires techniques (ONF, Alliance Bois Forêt, Chambre d’Agriculture…). « On a recensé les plantations existantes et on replante en fonction de la disponibilité des glands », explique l’entrepreneur soustonnais.
En 2016, une première formation de leveurs (récolteurs) de liège est effectuée auprès de professionnels de la filière bois. L’an dernier, l’association s’est dotée d’une machine qui prédécoupe l’écorce, ce qui assure « un gain de productivité et moins de pénibilité », se réjouit Christian Cave. Le 22 septembre dernier, lors du salon Forexpo de Mimizan, un rapport est remis à Muriel Lagorce, vice-présidente du Département des Landes. Cette étude consiste en une quantification de la ressource, via l’usage d’un drone, et un recensement des propriétaires de suberaie afin de les contacter et les motiver. Elle entame également une réflexion sur le changement de statut de l’association vers une structure économique à vocation commerciale.
La mission que se sont assignée ces passionnés de subériculture (sylviculture du liège) porte sur le temps long. Il faut en effet attendre environ 30 ans pour le démasclage (retrait de la première écorce) d’un arbre. On obtient alors du liège mâle, rugueux et impropre à la fabrication de bouchons. À partir de cette première récolte, on élabore du granulé, aux utilisations aussi variées qu’inattendues : panneaux d’isolation, objets de décoration, présentoirs de documents, planches de surf, tapis de yoga ou de sport, balles de baby-foot…
Après cette levée initiale, le chêne régénère son écorce tous les 10 ou 15 ans et produit du liège femelle. C’est à la deuxième levée de liège femelle, soit au bout d’environ 60 ans, que l’on récolte un matériau adapté à la fabrication de bouchons. Cela peut paraître long, mais la durée de vie d’un arbre – autour de 200 ans – autorise une douzaine de prélèvements.
Ce patient travail de recensement de la ressource et de réappropriation de techniques oubliées commence à porter ses fruits. Selon Julien Goullier, fondateur de l’entreprise SylGéCo à Castets et pilote des équipes de levage au « Liège gascon », « la superficie des suberaies dans les Landes Gascogne est estimée à 30 000 hectares. Lorsque l’association a démarré en 2005, on produisait 5 à 6 tonnes par an et la récolte 2021 est de 19 tonnes. Notre objectif à terme est d’atteindre 50 tonnes par an ». Guillaume Laborde de la société Ducasse-Buzet, bouchonnerie située à Cestas - dont la directrice, Delphine Ducasse, est présidente du « Liège gascon » -, se veut tout aussi optimiste : « on dénombre 27 000 tiges exploitables dans le Marensin. Lors de notre première récolte en 2016, nous avions produit 7 000 bouchons. En 2021, sur les 19 000 tonnes recueillies, nous avons obtenu 700 kg de liège femelle, ce qui équivaut à 10 000 bouchons ».
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