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À la recherche de la Grande mulette

10/09/2021

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© Thierry Gatelier | Dpt 40

Présente dans l'Adour et les Luys, cette espèce très menacée de moule d'eau douce mesurant jusqu'à 20 cm, fait l'objet d'une étude pluriannuelle de suivi, avec puces électroniques.

La Grande mulette n'est pas un animal qui aime parader. Ce bivalve, parmi les plus grands des eaux douces européennes, a même la capacité de s'enfouir complètement dans les cours d'eau quand il ne se fond pas dans son élément, ressemblant, parfois couvert d'algues, à un galet parmi les galets.

« Il y a aujourd'hui dans les Landes peu d'historique sur cette espèce qui était considérée comme disparue de France avant d'être redécouverte au début des années 2010. Au niveau mondial, elle est en danger critique d'extinction, son aire de répartition se limite à quelques rivières dans le Sud-Ouest de la France et un secteur très restreint sur l'Ebre en Espagne », détaille Thierry Gatelier, chargé de mission biodiversité au Département, qui participe activement aux opérations de suivi sur le site du Gué du courant à Saugnac-et-Cambran. 

Une cinquantaine d'individus à Saugnac

Sur cette portion assez peu fréquentée du Luy, qui devrait devenir un site Nature 40, un plan de gestion écologique en partenariat avec la Commune et la DDTM*, a été mis en place sur cinq ans, avec en action-phare l'étude de population de ces mollusques qui peuvent vivre plus d'un siècle. Un premier comptage en 2018, dans le cadre de cette labellisation, a fait état de 58 individus. L'an dernier, 51 ont été équipés de puces électroniques. 

Une grande mulette avec sa puce © Thierry Gatelier | Dpt 40

 

Ce mercredi 1er septembre, ils étaient six - dont Vincent Prié, scientifique indépendant spécialiste français des bivalves d'eau douce, un expert du bureau d'études Biotope et une technicienne rivière du syndicat du Luy -, à arpenter le cours d'eau à leur recherche. Une première ligne de trois personnes remontait le courant avec un aquascope ; derrière, une autre suivait avec un détecteur de puces. Au final, 53 moules géantes ont pu être retrouvées. 

Dès qu'on en trouve une, on plante un piquet à côté. On enlève chaque Grande mulette du substrat pour l'amener sur la berge, on fait les mesures et on (re)colle la puce de la taille d'un grain de riz sur la coquille. Dans le quart d'heure, elle retrouve son habitat, c'est un dérangement très court. On peut s'agenouiller à côté d'elle, elle reste ouverte et continue de filtrer, imperturbable.

Citation de Thierry Gatelier, chargé de mission biodiversité

Reste à savoir si les autres sont mortes ou simplement cachées, cette dernière option ayant les faveurs de technicien naturaliste du Département, assez optimiste. La plus petite recensée mesure 14 cm, correspondant à un animal d'une vingtaine d'années. « Pour être vraiment rassuré pour l'avenir, il faudrait des individus de 8 à 10 cm. On n'en a jusqu'ici pas trouvé, mais ça ne veut pas dire qu'il n'y en a pas », précise-t-il, soulignant que « la qualité de l'eau dans les rivières est plutôt en voie d'amélioration par rapport aux années 1990/2000 » alors que la Grande mulette souffre des polluants, nitrates et orthophosphates, de la sécheresse et de l'érosion.

Recherche au site du Gué du Courant, à Saugnac-et-Cambran © Thierry Gatelier | Dpt 40

Une reproduction possible grâce à la lamproie

Des recherches doivent se poursuivre sur d'autres affluents de l'Adour comme le Louts ou le Bahus. A partir d'un échantillon d'eau, il est d'ailleurs possible de trouver des fragments d'ADN de son espèce, afin de vérifier sa présence sur des tronçons de plusieurs kilomètres de long.

« Ça reste des effectifs très, très faibles, mais chaque année qui passera amènera davantage de certitudes sur le niveau de population », anticipe M. Gatelier. Selon lui, à Saugnac, « l'espèce se reproduit encore mais le processus de développement des larves est tellement compliqué que des étapes doivent échouer, ce qui explique le manque de jeunes individus ». La Grande mulette est en effet dépendante des lamproies marines qui hébergent ses larves pour une vie de parasite de quelques semaines sur les branchies des poissons. Si la larve ne trouve pas un poisson-hôte, elle meurt. 

Une sacrée aventure dans le monde étrange et sous-marin de ces mollusques quasi-immobiles durant toute leur longue vie. 

10 espèces étudiées

Dans le cadre de son Schéma Nature 40, le Département a engagé un programme d’acquisition de connaissances sur une sélection de 10 espèces animales et végétales :

Mouron à feuilles charnues (Plantes à fleurs)
Grande mulette (Bivalves d’eau douce)
Campagnol amphibie (Mammifères)
Fadet des laîches (Papillons de jour)
Tabouret des sables (Plantes à fleurs)
Chabot de l’Adour (Poissons d’eau douce)
Isoète de Bory (Fougères)
Phalérie atlantique (Coléoptères)
Faux-cresson de Thore (Plantes à fleurs)
Phragmite aquatique (Oiseaux)

La Grande mulette est la deuxième espèce étudiée, après le Mouron à feuilles charnues.  Le Campagnol amphibie a fait l’objet d’une étude en 2020, et le Fadet des laîches cette année.
 

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