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05/10/2022
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Dans les Landes, en 1982, « c’était un grand vide, il n’y avait pas d’association féminine » se souvient Janine Jarnac, fondatrice et présidente du CIDFF de 1982 à 1990. Monique Lubin, elle, a intégré la structure en 1984, avant de la diriger de 1992 à 2004. La sénatrice raconte l’accueil plus qu’hostile dans certains commissariats, où la parole de femmes terrorisées, venant porter plainte contre leur mari violent, était mise en doute. Certes, « tout ça a tout de même beaucoup évolué » mais « ça a toujours été un combat parce que, qu’on le veuille ou non, on ne nous laisse jamais si facilement que ça la place ».
Malgré 40 ans de lutte, « nous n’en sommes toujours pas venues à une égalité réelle » entre femmes et hommes, déplore Laurence Ladousse, élue présidente du CIDFF 40 en septembre 2021 : « sur le terrain, on constate que des inégalités commencent dès l’entrée à l’école, voire même dès la naissance ».
L’association compte 11 salariées, dont 4 juristes référentes violences conjugales pour le département des Landes. Sous l’effet conjugué des confinements et de la libération de la parole, le nombre d’appels est passé de 530 en 2020 à 831 en 2021. Même augmentation vertigineuse pour la gestion des Téléphones Grave Danger (TGD), attribués sur décision de justice aux personnes menacées par leur ancien conjoint : de 35 en 2021 à 80 en septembre 2022. « 4 juristes pour 80 téléphones, ce n’est pas tenable », constate sans détour Najat Vallaud-Belkacem, marraine du CIDFF 40 et ancienne ministre des Droits des femmes.
Les référentes travaillent en étroite collaboration avec l’Adavem-JP 40*, la justice, la gendarmerie, la police et les services sociaux. « On ne va jamais se substituer aux victimes qu’on rencontre », explique Marina Platonoff, l’une des 4 juristes dédiées, « on les amène à cheminer suivant 3 axes : la mise à l’abri, l’accompagnement juridique et administratif, la protection via l’évaluation de la situation ».
« Le CIDFF a clairement sauvé ma vie et celle de mon fils », témoigne ainsi Thi-Xuan Lo. Cette cheffe d’entreprise, indépendante et sociable, a échappé de peu à un féminicide : « avant d’être orientée vers le CIDFF, j’étais dans le déni total, je ne me sentais pas concernée par les violences alors que j’avais des hématomes sur tout le corps, des vertèbres cervicales déplacées. Grâce à tout ce qui a été mis en place, j’ai pu bénéficier de tous les dispositifs et d’un réel accompagnement ». Une rédemption inspirante, puisque la jeune femme est désormais bénévole à la Croix-Rouge.
Pour nombre de ces femmes au parcours cabossé, la reconstruction passe par l’aide à l’insertion professionnelle, deuxième mission du CIDFF. Augusta, la trentaine, compare les salariées de l’association à « des fées clochettes qui m’ont remis sur le droit chemin. Je n’étais plus que l’ombre de moi-même, j’avais perdu 8 kilos et elles ont su m’écouter et me guider, d’abord pour un logement, puis pour un travail. Ce sont des amazones qui nous soutiennent ! ».
L’accompagnement porte sur deux axes : l’image de soi et la co-construction de projet. En ce qui concerne le premier volet, Michèle Solureau, formatrice conseillère à l’image, propose deux modules, un atelier bien-être « où on apprend à se faire du bien par des gestes tout simples » et un atelier image de soi « où on travaille la confiance ». Martine n’était pas convaincue mais ne regrette pas d’avoir surmonté ses réticences : « on ne sait pas dans quoi on va tomber mais on a été reçu avec le sourire. On rencontre d’autres personnes, on réapprend à échanger, à donner son avis. On se réaffirme ».
L’idée pour Rose-Marie Bano est de permettre aux femmes de « redécouvrir un environnement culturel et économique, propice à la réinsertion ». La directrice du CIDFF insiste sur la mobilisation des partenaires qui permet « d’aller au plus près des personnes isolées » à Parentis, Labouheyre, Peyrehorade ou ailleurs.
Patricia Aupy s’occupe de la sensibilisation à l’égalité femmes-hommes et de l’accès aux droits. Elle forme des soignants et des travailleurs sociaux du Département à repérer d’éventuels cas de violences sexuelles ou sexistes. La juriste intervient également dans les écoles primaires et les collèges afin d’alerter les enfants sur toute forme de discrimination : « il faut leur faire prendre conscience qu’il y a des stéréotypes ». Conseillère départementale déléguée à l’Égalité femmes – hommes et à la Lutte contre les discriminations, Salima Sensou approuve : « lorsque de jeunes filles me disent qu’elles ne veulent pas être taxées de féministes, cela m’inquiète. Ce combat est culturel, nous devons le mener partout, tout le temps ».
La bataille pour l’égalité des droits est loin d’être gagnée, prévient Monique Lubin : « le CIDFF doit rester le premier outil pour que les femmes revendiquent leurs droits. Les salaires ne sont toujours pas égaux et nous devons encore démontrer 10 fois plus que nos homologues masculins. Nous devons ressortir le drapeau du féminisme ».
À la tête du CDIFF depuis un an, Laurence Ladousse mesure l’ampleur de la tâche. Elle cible comme chantier prioritaire la recherche de financements parce que « les sollicitations ont fortement augmenté alors que nous évoluons à effectif et budget constants ».
Dans un département aussi étendu que les Landes, Mme Ladousse, Atsem** depuis 22 ans à Saint-Martin-de-Hinx, souhaite « accroître la visibilité du CIDFF avec l’ouverture d’une 3e antenne dans la Communauté de communes Maremne Adour Côte Sud (MACS) », en plus de celles situées à Mont-de-Marsan et à Dax et de la douzaine de permanences disséminées dans le territoire. Troisième axe de progrès identifié par la présidente de l’association : développer encore plus les actions de sensibilisation à l’égalité et contre les violences en milieu scolaire et auprès des travailleurs sociaux et des professions médicales.
* Adavem-JP 40 : Association Départementale d'Aide aux Victimes et de Médiation des Landes Justice de proximité
** Atsem : agent territorial spécialisé des écoles maternelles
Le saviez-vous ?
En 2022, la contribution du Département des Landes aux missions et au fonctionnement du CIDFF s’élève à 175 000 €, soit environ la moitié du budget de l’association.
Le 25 novembre, le Département organise à Mont-de-Marsan la Journée départementale de lutte contre les violences faites aux femmes en partenariat avec l’État, les institutions et les associations. Après une matinée d’échanges et de débats, l’après-midi sera ouvert au grand public.
Pour aller plus loin
Les sites du département