Sauvegarder le patrimoine naturel pour les générations futures

Sur la façade de la maison familiale du XVIII^e, en face de l'église de Luxey, la pièce de bois gravée de la poule et du renard rappelle l'origine du logo « chipé, dit-il, par le Parc naturel régional des Landes de Gascogne ». « J'ai toujours vécu ici, là où mon arrière-arrière-arrière-grand-père avait eu l'intelligence de concilier la forêt, le bois et l'élevage, et c'est ici que je suis entré en religion forestière », assure André Bordes-Vidal.

Jeune, il voulait devenir officier de marine, avant de reprendre la gestion des pins, formé par sa mère.

Ex-président des sylviculteurs du Sud-Ouest, de la DFCI pendant 50 ans, ancien administrateur des papeteries de Gascogne et vice-président du Crédit agricole d'Aquitaine, il fut à l'origine en 1947 de l'assurance couvrant les risques incendie en forêt. « Ce qui a permis de survivre aux incendies de 1949. Tout le monde me disait que c'était impossible... Mais j'avais l'idée et la persévérance », témoigne celui qui a vécu 1 000 vies, du débroussaillage des propriétés sur ses premiers Massey Ferguson aux réunions dans les ministères, des coulisses du mariage de la reine d'Angleterre avec Lili Lacoste, l'héritière de Château Pétrus, à la création de la maison de L’Estupe-Huc (éteindre le feu en gascon) à Luxey, pour la mémoire de la lutte anti-incendie de forêts.

À 104 ans, cet adepte du festival Musicalarue fourmille encore de projets, comme créer une boisson à base de pins des Landes. « En France, on importe de la résine par tonnes alors que nos pins peuvent en pleurer », dit-il. En attendant, ce propriétaire de plusieurs milliers d'hectares qui a restauré des bâtisses landaises dans ses airials, s'est, depuis une dizaine d'années, rapproché du Département pour la sauvegarde d'espaces naturels, via des échanges de forêts galeries aux chênes remarquables plus que centenaires contre des parcelles de pin maritime. « Je ne vends rien mais je veux bien échanger », avait-il alors notifié à David Jimenez, technicien naturaliste au Conseil départemental.

A suivi un programme sur cinq ans visant à restaurer et à gérer une de ses lagunes, celle des Chemins. Devant le succès, une ORE (Obligation réelle environnementale*) qui permet d'agir sur le long terme, en l'occurrence 90 ans en engageant héritiers et futurs propriétaires, a été signée le 12 décembre sur quatre nouvelles lagunes et deux zones humides, soit un total de sept hectares entre Luxey et Callen où ont été repérées des espèces protégées comme la Rainette ibérique ou le Fadet des laîches. 

Au Département d'y mettre en œuvre des plans de gestion, faire du suivi, et peut-être un jour des animations pédagogiques pour sensibiliser le public à ces milieux naturels si landais.

* Obligation réelle environnementale : dispositif foncier dont la finalité est la protection de l'environnement et de la biodiversité, via un contrat de long terme, librement consenti entre un propriétaire qui reste propriétaire du bien et un cocontractant comme une collectivité publique.