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Coloc’ADHI, le long et beau combat de deux mères d’enfants autistes

27/03/2025

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© S. Zambon | Dpt 40

Nathalie et Carla, mamans de deux jeunes adultes avec TSA, portent avec détermination un projet d’habitat partagé à Morcenx-la-Nouvelle. Pour aider leurs fils à tracer leur propre chemin.

Parce que chaque autisme est un cas particulier, les parcours de Nathalie Lapassouse et de Carla Buytaert ne sont pas identiques. Leurs garçons, Théo et Lucas, respectivement âgés de 22 et 26 ans, ne sont pas au même stade de développement que ce soit au niveau de la communication, des apprentissages ou de la motricité. Mais les deux mamans, comme des milliers de parents d’enfants avec trouble du spectre de l’autisme (TSA), ont connu et connaissent encore la même alternance d’espoirs et de désillusions, la même recherche parfois frustrante d’informations, le même récurrent sentiment d’isolement. Avec, toujours, le même incommensurable amour pour oublier l’épuisement et repartir au combat.

Carla et Nathalie se sont rencontrées à l’Institut médico-éducatif Les Pléiades à Dax. Une éducatrice à domicile, intervenant dans les deux familles, a fait le lien. « Carla m’a beaucoup attirée », se remémore la cadette des deux femmes, « Lucas faisait partie des jeunes au-dessus du lot, un gamin apaisé, sans trouble du comportement, qui savait lire et écrire et répondait au bonjour. On voyait que sa famille était éduquée à l’autisme. Sa maman dégageait une maitrise que je n’avais pas ». 

Carla Buytaert et Nathalie Lapassouse (de gauche à droite) © S. Zambon | Dpt 40

Carla et Lucas

Cette apparente assurance n’était qu’une façade, tant la Belge d’origine, installée à Pouillon depuis plus de 20 ans pour suivre la mutation professionnelle de son époux, a traversé les mêmes aléas que les autres parents : « on a cherché tous les moyens pour que Lucas dorme bien, car il pouvait se rouler en boule dans un coin. Je n‘ai pas eu une nuit complète jusqu’à ses 10 ans ». Mais le dernier de ses trois enfants a été diagnostiqué TSA dès l’âge de 2 ans, ce qui a permis à sa mère de se former auprès de l’association Autisme Landes assez précocement. 

Et le diagnostic a surtout permis à la famille Buytaert de bénéficier de la venue, 3 heures par semaine, d’une éducatrice à domicile : « il fallait donner à Lucas tous les scénarios possibles et imaginables pour l’ouvrir au monde : à qui donner un câlin, ce qu’on peut jeter ou pas, ouvrir une porte, apprendre le ‘tant pis’, c’est-à-dire la frustration... L’intervention de l’éducatrice m’a permis de reprendre mon rôle de maman vis-à-vis de Lucas ».

Lucas et Théo (de gauche à droite) © Coloc'ADHI

Nathalie et Théo

Théo Lapassouse, le fils de Nathalie, n’a, lui, été diagnostiqué que le 20 janvier dernier pour un « TSA complexe avec un trouble sévère du langage et de la communication ». La fin d’un long chemin vers la reconnaissance du handicap. Adopté en Haïti à l’âge de 9 mois et demi, l’enfant a manifesté très vite des retards de développement, que les médecins ont d’abord mis sur le compte de son adoption. Puis les crises d’épilepsie sont arrivées… « On est allé de neurologue en neurologue. Lorsqu’il avait deux ans, un pédiatre m’a dit que je n’arriverai pas à grand-chose avec lui », se souvient sa maman, encore secouée par la violence de certains jugements. 

La nature enjouée de Théo n’a paradoxalement pas aidé l’enfant, explique sa mère : « nos autistes veulent tellement nous plaire et capter des choses en nous, qu’ils peuvent nous leurrer. Il souriait, il était joyeux. Dans sa classe d’inclusion scolaire (CLIS) à Parentis-en-Born, il commençait à reconnaitre de toutes petites phrases. Plus tard, à l’IME de Dax, il mangeait, participait aux balades, rigolait et faisait le pitre. Mais il n’était pas très travailleur et son caractère rieur a fait qu’on n’a pas cherché à améliorer ses compétences ».

L’adolescence a été une période délicate avec une lourde opération du dos, une humeur altérée par les changements de traitement et, surtout, un premier diagnostic, à l’âge de 16 ans, privilégiant un trouble du neurodéveloppement (TND). « Un terrible retour en arrière » pour Nathalie, « effondrée » à l’idée que la formation à l’autisme qu’elle avait enfin suivie deux ans plus tôt au Centre Ressource Autisme (CRA) n’ait servi à rien. Dans un inlassable mouvement de yo-yo, le second diagnostic de janvier dernier redonne une impulsion : « maintenant il faut avancer avec notre Théo qui a tout à apprendre ».

Au domicile de la famille Lapassouse à Saint-Vincent-de-Paul, des pictogrammes ornent les murs afin d'aider Théo à mémoriser des repères temporels © S. Zambon | Dpt 40

L’habitat partagé pour consolider l’avenir

L’amitié entre Nathalie et Carla s’est cimentée autour de l’envie commune de préparer le futur de leurs fils en leur pavant la voie vers plus d’autonomie. « On a tous une date de péremption. Je ne veux pas que mon enfant vieillisse chez nous et je veux qu’il soit dans un endroit bienveillant, plus petit », dit l’ainée des deux femmes. « J’ai besoin de vivre sans mon fils. Et lui, c’est pareil », renchérit sa cadette, qui s’appuie sur les dernières années de Théo à l’internat de l’IME, synonymes de moments de répit pour les aidants familiaux et de gain d’autonomie pour le jeune adulte : « il s’habille et mange tout seul, il écoute de la musique et il partage des hamburgers avec ses copains ».

Plutôt que de confier leurs fils à des structures pour adultes avec TSA, les deux complices s’accordent sur l’idée de créer « un habitat dédié qui les portera et leur offrira un quotidien rythmé avec plus de souplesse, parce que partagé avec un petit groupe ». C’est ainsi qu’elles fondent en 2021 Coloc’ADHI (pour Colocation Autisme Différence Handicap Intégration), Nathalie en devenant la présidente et Carla la vice-présidente.

Les deux mères de famille trouvent une oreille attentive auprès de Paul Carrère, vice-président du Département délégué à la Solidarité et maire de Morcenx-la-Nouvelle. La commune a cédé à XL Habitat, principal bailleur social des Landes, un terrain de 11 000 m2, sur le site de l’ancienne piscine, à 500 mètres du centre-ville. C’est là que sera construit l’habitat partagé, « inséré dans le village », rêvé par Nathalie et Carla. Il y côtoiera une micro-crèche et une Maison d’assistantes maternelles qui sont en train de sortir de terre. 

Parallèlement, les deux amies se sont intégrées avec bonheur dans la dynamique du projet « Chacun sa vie, chacun sa réussite » à destination des jeunes adultes autistes, porté par le Département des Landes et l’Agence régionale de santé. Au-delà des promesses de financement du futur logement inclusif, elles se sont forgé un réseau, au gré des rencontres entre les divers partenaires, comme les Rendez-vous landais de l’autisme, dont la 4e édition aura lieu les 3 et 4 avril prochains.

Malgré ses problèmes de motricité, Théo fait preuve d'une redoutable adresse lorsqu'il va ramasser des œufs chez le voisin © Coloc'ADHI

Au fil des mois, dans l’attente du début du chantier, Nathalie et Carla ont peaufiné leur projet. L’habitat partagé accueillerait sept jeunes adultes avec une mixité de handicaps. « On voudrait travailler l’entraide, chacun soutiendrait l’autre dans ses faiblesses », expliquent les fondatrices de Coloc’ADHI qui imaginent que cinq autistes côtoieraient deux personnes avec déficience autre que mentale (moteur ou visuelle). « Et je voudrais qu’il y ait aussi des filles, pour la mixité », ajoute Nathalie.

Les mamans de Théo et Lucas comptent travailler avec le centre intercommunal d’action social (CIAS) de Morcenx pour l’organisation et l’encadrement de la maisonnée. Elles envisagent un poste de coordinateur qui ferait le lien entre les jeunes, leurs familles et le secteur médico-social. Il y aurait en permanence trois auxiliaires de vie qui se relaieraient 24h/24. Un accompagnement sécurisé qui irait de pair avec des activités favorisant l’autonomie et l’intégration dans la vie de la commune. 

Dans cette optique, Nathalie et Carla se sont déjà rapprochées de l’association Caminante, qui gère le Foyer Castillon à Morcenx. Une sortie a ainsi été organisée début mars au parc de Moré pour Théo, Lucas et deux autres jeunes adultes autistes appelés à former le premier noyau du futur habitat partagé : « l’idée est que les jeunes apprennent à se connaitre autour de sorties, de loisirs, d’activités communes et même de week-ends avant d’être plongés progressivement dans un habitat partagé ».

L’ouverture de la maison est espérée pour fin 2026 ou début 2027. Guidées par le désir de voir leurs fils construire leur propre destin à la mesure de leurs capacités, les deux mères courage ne s’interdisent rien, pas même pour une intégration progressive dans le monde du travail. « On part de l’objectif à atteindre, et pas du frein handicap », disent-elles en chœur.

 

 

 

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