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07/07/2022
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« L'Andalousie est au bout des errances, celles qui viennent d'Afrique, d'Europe, d'Asie. Le mouvement des hommes s'est arrêté là mais pas l'errance qui est en eux. Elle continue par le flamenco » : dans cette vision sublime, Olivier Deck donne peut-être la clé de son tropisme andalou. Né en Béarn et exilé dans les Landes, il cultive lui aussi le goût du voyage immobile : écriture, peinture, poésie, musique, photographie, son âme vagabonde d'un univers l'autre. Et parfois s'arrête au détour de quelques notes, de quelques mots.
Comme lors du Festival Arte Flamenco en 2021, lorsqu'il pousse la porte de la masterclass donnée par Rafael Riqueni, son Leica monochrome autour du cou : « je le salue, on échange quelques mots, il remarque que j'ai les ongles longs et des bracelets en bois au poignet, un truc de guitaristes. Je lui en offre deux, il les porte toujours ». Pendant les cinq jours du festival, lorsqu'il en a l'occasion, Olivier Deck promène Riqueni à travers les paysages landais. Quelques photos, quelques mots, de longs silences : « à la fin du festival, il me dit : viens à Séville, on continue ».
Le photographe accomplira sept voyages au cours de l'année, dans cette Andalousie qu'il arpente depuis l'enfance mais qu'il n'avait jamais photographiée : « il y a quelque chose là-bas, une force qui vient de la lumière ou de la terre et qui fascine les artistes depuis toujours ». Chaque jour il marche, solitaire, de 5 heures du matin à minuit, à travers les rues de la ville-muse, en prenant garde à ne jamais savoir où aller. C'eût été la fin de l'errance.
Dans le quartier de Triana, il retrouve parfois Riqueni, partage son quotidien, sa musique, ses silences encore. « La première fois que j'ai marché dans Triana avec lui, je pensais avoir la conversation du siècle mais il n'a pas dit un mot », s'amuse Olivier Deck. Silencieux mais bienveillant, fuyant mais complice, le maestro fascine : « la musique, c'est d'abord du silence habité par des notes, poursuit le photographe, Riqueni n'est plus dans la recherche de la virtuosité, il tend vers une fragilité, une profondeur qui mènent au silence. Il y a parfois un siècle entre chaque note, dans lequel il met tout son cœur, ses souffrances, son âme ».
Comme la guitare de Riqueni, les photographies d'Olivier Deck font entendre le silence : la lueur d'un lampadaire sur les pavés sévillans suggère les pas d'un promeneur solitaire. Une tasse posée sur une table diffuse la rumeur d'un café sévillan. Plus loin, le battement d'ailes d'une colombe traverse l'image, des éclats de voix nous parviennent d'une fenêtre entrouverte, le souffle de la ville du coin de la rue et toujours, partout, les notes suspendues de Rafael Riqueni. « J'ai étudié son style en profondeur, jusqu'à remonter aux origines de la guitare flamenca, raconte Olivier Deck, quand je lui ai fait part de mes réflexions, il m'a répondu : écris-le, je te dirai si tu as raison ».
Olivier Deck l'a écrit, dans un superbe ouvrage mêlant textes et photos et publié aux éditions Contrejour, Rafael Riqueni, une guitare de cristal. De son errance andalouse, il a également rapporté ces images en clair-obscur, qui sondent l'âme andalouse et celle du maestro, exposées dans les deux salles du Centre d'Art Contemporain Raymond-Farbos pendant la durée du Festival Arte Flamenco.
Le vendredi 1er juillet, toujours au CAC, il est revenu avec Serge Airoldi sur cette rencontre. Pour l’occasion, la bailaora Carmela Amodeo, nièce du guitariste, a improvisé une chorégraphie inspirée de ses photographies. Sans musique. En silence.
À lire absolument sur le site d’Arte Flamenco : Rafael Riqueni vu par Serge Airoldi.
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